Pourquoi continuons-nous à massacrer la planète ?

Les problématiques environnementales sont de plus en plus présentes à nos consciences, via nos médias, Greta Thunberg, «Extinction Rebellion», et mille autres actions, messages et échos.

Et cette prise de conscience est justifiée. Le réchauffement de notre planète est manifeste, et il n’y a plus lieu de contester l’implication humaine. Les conséquences se font déjà sentir sur les espèces animales qui disparaissent massivement, sur les forêts dévastées par d’immenses incendies et les glaciers qui fondent comme neige au soleil. L’être humain en souffre et va en souffrir, à commencer par les plus pauvres et les plus vulnérables, jetés sur les routes par les sécheresses ou la montées des eaux, quelle que soit leur part dans le réchauffement. Il ne fait plus de doute qu’il faut réagir vigoureusement, et pourtant les changements sont toujours trop petits, trop lents et trop tardifs.

Derrière la surexploitation des ressources naturelles, la pollution et la passivité des dirigeants se cachent des réalités du cœur humain. Nous vivons dans des sociétés de consommation, où l’on attend, voire promet, que la possession de biens matériels nous comblera, nous rendra heureux. Pire, la publicité et le culte de la nouveauté nous pousse non seulement à avoir et à garder, mais à changer, jeter, remplacer. Et nos politiques publiques sont toujours orientées par l’a priori qu’il faut nécessairement de la croissance, mise en danger si l’on garde ses appareils et minimise sa consommation.

Mais ce vice n’est pas une spécificité de notre époque, déjà dans la Bible l’apôtre Paul parlait de « la soif de posséder, qui est une idolâtrie ». L’idolâtrie, c’est donner la place ultime et centrale dans son cœur à des choses qui n’en valent pas la peine. Le philosophe et mathématicien Blaise Pascal décrivait fort bien l’existence d’un vide dans l’homme, dû à la perte de la connaissance du Dieu créateur, infini et immuable. Pascal souligne l’avidité et la course effrénée de l’humanité qui cherche et cherche ce qui va la remplir, croyant toujours que le prochain bien ou la prochaine expérience lui apportera enfin la satisfaction. Mais cette satisfaction durable lui échappe parce que rien n’est à la hauteur de Dieu. Alors il lui faut chercher plus, plus d’expériences, plus de voyages, plus de biens. La frénésie de consommation qui alimente la crise climatique a donc ses racines dans un problème spirituel, dans l’éloignement de l’homme vis-à-vis de Dieu.

Le récit biblique montre l’être humain placé par Dieu comme gestionnaire de la nature, appelé à la « cultiver et la garder », en développant avec soin ses potentialités. Le bien ultime pour la nature n’est pas la disparition de l’humanité, comme certains le pensent, mais une harmonie incluant Dieu, l’humanité et la création. Cette harmonie initiale a été rompue par la volonté d’autonomie de l’être humain, et la nature en fait également les frais.

On imagine parfois que le message de la foi chrétienne se limite à « sauver des âmes », à un salut individuel pour une éternité désincarnée. Mais dans ce message, Dieu s’est fait homme pour « tout réconcilier avec lui-même », permettant dès maintenant de retrouver la paix avec Dieu et la nature, et annonçant le rétablissement de tout ce qui a mal tourné dans notre monde.

C’est en Dieu que nous pouvons trouver notre satisfaction, notre bonheur et notre équilibre, plutôt que dans la consommation ou les expériences touristiques. Le retour à Dieu doit aussi nous conduire à valoriser pleinement nos relations avec nos prochains, et au repentir pour la manière dont l’humanité a manqué à ses responsabilités en maltraitant le monde créé. Je ne peux alors que regretter que les chrétiens n’aient pas été plus exemplaires dans le renoncement aux illusions commerciales, et dans la démonstration de combien Dieu suffit à combler un cœur, quoique les exemples existent.

Jean-René Moret, pasteur à l’Église Évangélique de Cologny (FREE)

Article paru le 11 novembre dans le Courrier

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