Chronique sur l’optique Le Comptoir épisode 15 : la perception

Celle qui nous éclaire par ses feux, sans laquelle nous n’y voyons plus clair, la lumière à des secrets bien cachés à nous confesser. Si comme saint Thomas vous vous dites, je ne crois que ce que je vois… c’est que vous manquez certainement d’imagination. 

Lorsque la lumière, issue du soleil par exemple, rencontre un prisme, (vous savez, ce morceau de verre en forme de triangle), alors elle se décompose sous nos yeux en un arc-en-ciel. Exactement comme sur la pochette de l’album de Pink Floyd “The Darkside of the Moon”. Il y a d’abord le violet puis le bleu, ensuite on trouve le jaune et le orange et enfin le rouge. C’est ce que l’on appelle le spectre de la lumière visible, mais tel Casper, notre spectre lumineux passe la plupart de son temps invisible. Il s’étend au-delà de nos capacités visuelles. Cette partie fantomatique est aussi un rayonnement lumineux mais n’est associé à aucune couleur. Puisque ce n’est pas une couleur… si vous avez bien suivi… c’est invisible.

“Moi je ne crois que ce que je vois” Mais alors comment on fait pour voir l’invisible ? L’histoire commence avec un thermomètre. C’est un astronome britannique Sir William Herschel qui un jour se dit : ”Well, le lumière blanche ça chauffe très beaucoup. Mais si je le décompose en arc-en-ciel, quelle couleur transporte la chaleur ?” Alors il place méticuleusement son thermomètre sur chaque couleur. Le bleu, rien, le jaune ça chauffe légérement. Arrivé au rouge, il note une augmentation significative de la température. Piqué de curiosité, il décale encore légèrement son thermomètre. Précisément à l’endroit où il n’y a rien… Surprise, laissez-moi vous présenter l’infrarouge ! Il est un peu timide alors on ne le remarque pas tout de suite : il se cache bien mais il était là depuis toujours juste à côté du rouge. Il transporte une énergie thermique mais notre regard lui est complètement insensible. Il fallait bien avoir un peu d’imagination pour laisser traîner son thermomètre dans un coin ou le spectre lumineux nous semblait s’arrêter.

Avec la course effrénée de l’humanité à se doter de technologie de plus en plus efficace pour appréhender son environnement, nos appareils photo se sont développés pour nous donner une image toujours plus fiable du réel, même de celui qui se cache, car le réel ne se contente pas de ce qui nous est directement accessible. Tant est si bien que maintenant nous sommes capables de voir le monde en infrarouge. Les images prisent dans cette couleur invisible sont restituées sur ordinateur par des contrastes de noir et de blancs, et alors un nouveau monde s’ouvre devant nos yeux. Nous ne sommes officiellement plus aveugle à l’infrarouge, nous voyons désormais clairement ce qui nous était inaccessible. Nous voyons ce que le thermomètre voyait.

Dans nos appareils photo, on ajoute un réseau de diffraction, on conçoit le détecteur comme une cavité Fabry-Pérot, on utilise la résonance plasmonique des métaux, on opte pour une structuration de la matière façon cristaux photoniques, en s’amuse même à augmenter la résistivité de la couche d’épitaxie…ouf. Tout ça pourquoi ? Pour voir toujours mieux l’infrarouge, parce que lorsqu’il devient source de lumière notre vision du monde change, on peut alors diagnostiquer les cancers in vivo en temps réel et de façon non intrusive, on peut surveiller l’environnement, et vérifier la qualité des produits agro-alimentaires par exemple. On peut voir à travers une épaisse couche de fumée ou de poussière tel Superman où bien encore obtenir la nyctalopie.

Et moi, dans tout ça, je suis comme beaucoup, je ne crois que ce que je vois… pourtant, il y a bien quelque chose d’autre d’invisible que je percois indirectement. C’est comme s’il y avait quelque chose au fond de moi qui n’arrivait jamais à être totalement comblé. Un désir si profondément ancré en moi, de quelque chose de meilleur, de quelque chose d’autre. Et quand je regarde le monde, l’Histoire, la société, j’ai l’impression de ne pas être le seul dans ce vide existentiel. Les efforts produits sans cesse pour combler notre manque en vain me donnent le vertige. On cherche ce que l’on a pas un peu partout, loisir, vacances, cinéma, famille, alcool, sexualité. On se goinfre à coup de confort et de plaisir aspirant au bonheur pour se sentir exister quelque part au milieu de nul part, au milieu de rien. La seule chose qui nous console de nos misères est le divertissement disait Pascal avant d’ajouter : c’est pourtant la plus grande de nos misères.

Tout comme le thermomètre avec l’infrarouge, c’est ce désir qui me fait ressentir l’invisible. Et je dois conclure comme C. S. Lewis : si je trouve en moi-même un désir qu’aucune expérience de ce monde ne peut satisfaire, l’explication la plus probable est que j’ai été fait pour un autre monde.

Mais alors, la question revient : Comment fait-on pour voir l’invisible ?

Et si l’invisible pouvait être vu, et si c’était la foi cette technologie qui nous permettrait de voir ce que notre thermomètre ne fait que de toucher du doigt ? Faisons le paris que c’est pas tellement qu’il faut être aveugle pour avoir la foi mais plutôt qu’il faut avoir la foi pour y voir clair. Alors veux-tu essayer cette technologie avec moi ?

Elie Cobo, 2023

Cette chronique est extraite du podcast le Comptoir, le podcast du GBU. Retrouvez l’intégralité de l’épisode 15 sur la perception sur Youtube et Spotify

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