Dieu était-il en vacances pendant la Shoah ? Et y-est-il encore ?

Cette semaine, l’un de vous nous a posé  cette question en ligne: “Dieu était-il en vacances pendant la Shoah ? Y est-il encore ?”

Cette question est importante, car la Shoah – qui veut dire catastrophe en hébreu et désigne l’extermination systématique des Juifs menée par les nazis entre 1942 et 1945 – demeure encore aujourd’hui un traumatisme civilisationnel dont nous avons encore de la peine à mesurer toutes les conséquences. Cela s’explique par le fait que ce génocide s’est produit dans des sociétés perçues jusqu’à là comme civilisées et avancées, et qu’il a été rendu possible par l’avancée technologiques et l’utilisation de techniques industrielles.  En cela, la Shoah est devenu l’exemple emblématique de la barbarie humaine.

Cette question “Où est Dieu…?”, se trouvait déjà dans le livre La Nuit d’Elie Wiesel publié quelques années après les événements.
Dans cet ouvrage se trouve décrite une scène d’exécution. Un jeune garçon de 12 ans est exécuté par pendaison devant toute la foule des détenus.  Elie Wiesel raconte « Et nous devions le regarder bien en face. Il était encore vivant lorsque je passais devant lui. Sa langue était encore rouge, ses yeux pas encore éteints. Derrière moi, j’entendis – quelqu’un – demander : “Où donc est Dieu ?” Et je sentais en moi une voix qui lui répondait : “Où est-il ? – Il est là : pendu ici, à cette potence… »

Au regard des horreurs de la Shoah, il est tout à fait légitime de se demander si Dieu s’est absenté, et c’est la même question qui se pose au regard de tous les génocides et grands massacres de l’histoire : génocides arménien, cambodgien ou rwandais… son inaction apparente pour empêcher totalement le mal, semble montrer que ce dieu est absent voir inexistant… à moins qu’il soit juste indifférent, voire impuissant ? Ce qui nous amène à notre prochaine question.

De quel Dieu parlons-nous ?

Certains philosophes humanistes ont parlé de l’impossibilité de croire en Dieu, et même de sa “mort” après la Shoah.

Mais si il y a bien un dieu qui est mort à Auschwitz, c’est le dieu “roue de secours”, c’est ce dieu imaginaire qui est une sorte de papa Noël tel que se l’imagine la piété populaire. C’est un genre de vieux bedonnant qui, depuis son nuage, regarde avec un détachement amusé ses créatures qui s’agitent.  De temps en temps, il essaie de faire en sorte que tout le monde puisse avoir une bonne expérience sur terre, mais sa première tâche consiste à distribuer plein de bons points à tout le monde et – quand il le faut vraiment – de gronder avec indulgence les petits sacripants qui exagèrent. Un tel dieu “roue de secours” aurait dû immédiatement intervenir de sorte qu’aucune de ses petites créatures ne soit blessée au cours de l’expérience. Le problème, c’est que ce dieu là n’existe pas et il n’est pas le Dieu auquel la question a été adressée.

Le Dieu unique, Vrai et Tout-Puissant est tout Autre. Et ce Dieu là a parlé par des prophètes et s’est révélé à l’humanité dans les Écritures Saintes.  Et l’Histoire qui est révélée n’est ni légère ni gaie comme le sont les fables inventées par les humains.

Dans la Bible, il est enseigné que l’Histoire du monde est celle d’une déchirure : on y apprend que l’humanité – en suivant l’exemple d’anges déchus appelés démons – a souhaitée devenir son propre dieu. Avec notamment pour objectifs de devenir leur propre autorité, et de redéfinir le Bien et le Mal en fonction de leurs désirs, ce qui n’a de cesse de propager le mal sur la terre.

Ainsi, collectivement l’humanité est coupable de s’être révoltée contre le Créateur de l’univers, d’une certaine façon elle est devenue son ennemie. Heureusement – et c’est ce que raconte la Bible par la suite – Dieu met en oeuvre un grand projet pour guérir sa Création tout en sauvant parmi les humains tous ceux qui se tourneront vers Lui et lui feront confiance.

Pourquoi Dieu n’a-t-il pas empêché la Shoah ?

Considérer qu’il était du devoir de Dieu d’empêcher la Shoah revient à considérer qu’il est de son devoir de nous priver des conséquences néfastes de nos choix. Pourtant, l’existence humaine présuppose qu’il y ait un lien entre les actes et décisions qui sont les nôtres, et les conséquences qui en découlent.

Si Dieu privait les humains des conséquences de leurs actes à chaque fois que cela occasionnait de la souffrance et du Mal, serait-ce encore une vie ? Si à chaque fois que quelqu’un se jette du dixième étage d’un immeuble, ou que quelqu’un jette un projectile sur un autre, Dieu suspende l’application des lois physiques qu’il a créé, cela ne rendrait-il pas l’univers totalement incompréhensible ? La loi de causalité n’existerait plus et le monde ne ferait absolument plus sens. Ce n’est pas tout, pourquoi Dieu devrait-il s’arrêter aux actes ? Il devrait aussi détourner toutes les pensées mauvaises !

Mais si Dieu agissait de la sorte, nous ne serions plus des humains responsables, évoluant dans un monde façonné par les conséquences de nos propres choix. Ce serait comme nier notre existence. Il n’est donc pas logique pour un Dieu juste, bon et saint de nous priver de toutes les conséquences de nos actions, ça ne serait ni nous aimer, ni nous aider.

Pourquoi les hommes ont commis la Shoah ?

Dans la Bible, on apprend que les hommes sont responsables de leurs choix.
Cela est rendu possible par le fait que Dieu a gravé dans la conscience humaine une certaine connaissance de ce qui est Bien et Mal, ne serait-ce que comme concepts de base. Par exemple, tout le monde sera d’accord que tuer gratuitement un autre être humain c’est mal, que le viol est également une chose horrible etc… et que nourrir un affamé, ou dépolluer une plage sont de bonnes choses.

Aussi, pour vivre dans un monde sans génocide, le programme est simple :
il appartient à chacun de répandre le bien autour de lui et de s’abstenir du mal.

Et là le fond du problème se dévoile !

C’est pleinement impossible, parce que chaque société et chaque individu ne cesse de combattre cette connaissance innée du bien et du mal et de redéfinir – en fonction de ses intérêts et désirs – ce qui est bien et mal indépendamment de Dieu. C’est pourquoi telle société considérera qu’il est normal d’abandonner les vieilles personnes, que telle autre trouvera le meurtre de foetus ou de nourrissons tout à fait admissible, tandis que telle autre ira jusqu’à justifier la haine à l’égard d’une catégorie de la population.  Et c’est comme ça que se produit tout génocide : peu à peu, on est toujours d’accord que tuer gratuitement un être humain est mal, mais on fait admettre que tuer tel type d’être humain n’est pas un crime puisqu’il ne s’agit pas de vrais êtres humains.

Impossible également, parce que il arrive encore à chacun d’entre nous d’agir de façon égoïste, malsaine et injuste, et donc de choisir volontairement le Mal, même lorsqu’on sait très bien ce qu’on est en train de faire – ou de ne pas faire. L’histoire regorge de gens qui savent pertinemment que ce qu’ils font est foncièrement mal, mais qui le font par peur, par plaisir ou par intérêt.

En fait, il s’agit là des deux facettes de ce que la Bible appelle “péché”. L’humanité est corrompue par le péché, elle est coupée de Dieu et elle en est à la fois coupable et victime.

Et toi, que fais tu ?

Il y a actuellement des massacres et des génocides partout dans le monde : quelle est votre action ?

Vous pensiez peut-être “les Allemands à l’époque nazie étaient des gens mauvais, mais moi je ne suis pas comme eux”, si vous avez ce raisonnement vous prouvez juste que vous faîtes vous aussi partie du problème !

Parce que pour qu’un génocide ou un massacre se produise, il n y a pas seulement besoin de tortionnaires et de meurtriers, il y a besoin d’une grande proportion de gens qui ne veulent pas savoir, de gens qui ne veulent pas prendre de risque, de gens qui ne diront rien ou qui resteront sourd pour des raisons idéologiques ou confessionnelle. Ce que la Bible appelle péché, ce n’est pas seulement faire le mal, c’est aussi s’abstenir de faire le Bien au bon moment.

Et d’une façon ou d’une autre, nous avons tous une part de responsabilité dans la propagation du mal et la souffrance faite à d’autres êtres humains.

Ce que la Shoah révèle de façon immanquable, c’est que le cœur de l’être humain est enclin à faire le mal et à ne pas faire le bien.
Ceux qui pensent qu’il suffit d’un petit re-calibrage éducatif, et qu’il suffit d’endoctriner les enfants avec des idéologies progressistes pour qu’une telle chose ne se reproduise jamais, passent complètement à côté du cœur du problème, d’ailleurs les systèmes politiques qui visaient à transformer et rééduquer l’humain sont dans l’Histoire ceux qui ont fait le plus de morts.

La Shoah démontre que les progrès technologiques, culturels et sociaux ne peuvent pas changer le cœur de l’homme.

Que faisait Dieu ? Et que fera-t-il ?

Si Dieu n’était pas en vacances, que faisait-il ?

Il était là, présent par son Esprit, au milieu de ces gens. Dieu connaissait chacune des victimes par son nom, leur vie, leurs relations, leurs défauts aussi. Dieu connait et aime chacune de ces personnes plus que nous ne les connaîtrons jamais.

Qui a propagé la haine ? Qui a donné l’ordre ? Qui a dénoncé ? Qui a arrêté ? Qui a conduit ? Qui a ouvert le feu ? Qui a enclenché le mécanisme de mort ? Dieu sait également tout des coupables.

Et si pour autant, Dieu ne prive pas l’humanité des conséquences de ses actions, il veille néanmoins sur le monde et conduit de façon mystérieuse l’Histoire jusqu’à son grand dénouement. Remarquons d’ailleurs que les nazis n’ont pas gagné et les Juifs n’ont pas été entièrement exterminés – et comme souvent dans l’histoire –  les sociétés et systèmes qui commettent de grandes injustices sans s’en repentir, finissent un jour où l’autre par disparaître.

Alors bien-sûr, même si les nazis n’ont pas gagné, de nombreux tortionnaires et criminels sont morts paisiblement dans leur lit, sans avoir été inquiété… jusqu’au jour où Dieu rendra justice à tous. Car Dieu a désigné un jour où il demandera à chacun des comptes pour ce qu’il a fait pendant sa vie.

Parce qu’il est à la fois un Dieu de justice et un Dieu d’amour intransigeant, le Dieu de la Bible est le seul à pouvoir vraiment rendre compte d’Auschwitz.
Mais dans l’Histoire, Dieu ne fait pas seulement que de compatir avec les humains – aux souffrances qu’ils s’infligent entre eux – ni de préparer le jour du jugement, la Bible enseigne que Dieu est venu s’incarner sur la terre, vivre une vie d’homme, partager la souffrance à nos côtés. Il l’a fait pour sauver les hommes et leur donner un cœur nouveau. Pour cela il est même allé jusqu’à subir l’injustice, la violence et la mort de la main des hommes….

…alors à cette question : Où donc est-Dieu ? Dieu nous répond, “je suis là, ici, pendu à cette croix…”

Juin 2019, Charles B.

8 réflexions sur « Dieu était-il en vacances pendant la Shoah ? Et y-est-il encore ? »

  1. Dieu est amour, mais n’est notre valet ou notre de garçon de commission il est un grand Dieu ki nous demande de choisir la vie et partager cette vie avec les autres mais si nous refusons il ne oblige en rien mais nous payons les conséquences de nos actes , le Dieu en Jésus-Christ est le Dieu vivant

  2. Merci pour ce message très riche et surtout cette question qui revient chaque fois dans nos soucis et luttes au quotidien “Où donc est-Dieu ? Dieu nous répond, “je suis là, ici, pendu à cette croix…”

  3. Je cite Charles B : ”Considérer qu’il était du devoir de Dieu d’empêcher la Shoah revient à considérer qu’il est de son devoir de nous priver des conséquences néfastes de nos choix.”. C’est la phrase que j’ai choisie pour dire qu’en effet, s’agissant de confirmer que l’homme porte la responsabilité de ses actes, il ne peut incriminer ”Dieu”; surtout pour les plus croyants des croyants que je qualifie personnellement d’obstinés. Toutefois, il est impossible à quelque croyant que ce soit, même obstiné, de démontrer une quelconque volonté délibérée et divine de nous laisser faire l’expérience des conséquences de nos actes pour soi-disant mieux nous responsabiliser. Dit autrement, par un tel cheminement intellectuel, personne n’est en mesure de démontrer la moindre intervention d’une prétendue divinité et ce, tout simplement parce que les éléments naturels qui côtoient au quotidien la pensée et les actions des hommes, même les bêtises de ce dernier et surtout ses bêtises, sont les seuls et authentiques influences qui échappent à la l’homme. À cela, rien de plus normal. La nature ne fait pas dans le spirituel et encore moins dans la considérations d’un ”Dieu” ou de dieux qui n’existent pas contrairement à l’homme qui lui y croit sottement. Et je renforce ma thèse par ces deux questions que je mets au défit ”La Foi en Questions” d’y apporter la moindre réponse : ”Les croyants ayant sans le moindre doute prié Dieu qu’il fasse cesser la guerre. Est-ce bien lui qui a fait monter les alliés contre Hitler et l’emporter sur lui ? Ou sont-les hommes qui, quoique les croyants ont imaginé que Dieu est intervenu, tous seuls (sans la moindre intervention divine) ont réussi à mettre hors d’état de nuire les nazis ?”.

    1. Bonjour,
      D’abord, il ne me semble pas du tout évident que Dieu ne soit pas utile pour rejeter les assassins. Bien sûr, un athée pourrait tout à fait considérer que tuer quelqu’un est un mal moral, et heureusement ils le font, mais la question ne se trouve pas là. La question est plutôt, est-il possible de fonder une norme morale objective et contraignante sans avoir recours à une entité transcendante ? En ce sens, je vous invite à lire une réflexion sur l’absurde de Camus : https://www.foienquestions.eu/?p=1468
      Si la réponse à la question précédente est négative, il s’ensuit que le rejet des assassins n’est qu’une question de préférence personnelle pour les personnes niant l’existence de Dieu. Et donc Dieu est utile pour rejeter objectivement les assassins.

      Ensuite, je ne vois pas le lien entre l’inutilité d’une chose et la conclusion à son inexistence.

  4. N étant par croyante, je trouve que toutes vos paroles sont un paquet de Fadaises, je me demande même comment vous pouvez trouver un sens à vos paroles. c’est tellement facile d’écrire ce que vous écrivez, c’est tellement facile de fermer les yeux, d’en être réduit à l’état de larve, de se contenter de regarder et de baisser la tête car en fait c’est ça… les croyants ferment les yeux sur la vérité.
    Comment en 2023 peut on croire en un Dieu quel qu’il soit ?
    … en fermant les yeux, en se bouchant les oreilles et en ne critiquant pas surtout pas une ” pseudo” puissance supérieure.
    Intéressez-vous aux origines de la religion et j’espère que vous comprendrez que vous êtes dans une utopie la plus totale.

    1. Bonjour,
      Votre commentaire se constitue essentiellement en un jugement valeur sur les croyants en faisant état d’un dysfonctionnement psychologique. Je comprends tout à fait que la foi chrétienne puisse sembler difficile à concilier avec la réalité complexe et souvent troublante du monde contemporain, mais chacun, de sa propre façon, cherche à trouver du sens à sa vie, à travers la philosophie, les sciences, une pratique sportive…
      C’est ce que nous essayons de faire dans ce blog en proposant un discours argumenté, je vous invite donc à prendre un peu de recul sur votre critique. À essayer de lire sans présupposer que nous sommes “réduits à l’état de larve”. Alors peut-être, nous pourrions discuter des raisons qui nous poussent à croire en Jésus un peu plus sereinement.

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